Jacques Auzou : à qui profite le crime ? lundi 29 octobre 2012

Une analyse sur la politique locale, rédigée par le journaliste Pascal Serre

Jacques Auzou. À qui profite le crime ? 28 février 2012 © Pascal Serre

Le renvoi en correctionnelle de Jacques Auzou et de trois de ses proches ne se limite pas à la chronique judiciaire. Elle est aussi politique. Dans sa célèbre plaidoirie Cicéron posait la question :

« à qui profite le crime ? »

Le procureur de la République de Périgueux, Yves Squercioni a renvoyé en correctionnelle le maire de Boulazac et vice-président du conseil général Jacques Auzou et trois de ses proches pour prise illégale d'intérêts. L'audience aura lieu le 11 février prochain.

Sur le plan judiciaire on peut penser que cette décision a été précédée, pour le moins, d'une information préalable auprès du procureur général de Bordeaux lequel est directement nommé par le chef de l'État. procureur général qui, en France, est sous la hiérarchie du pouvoir politique par le biais du ministre de la Justice. La décision judiciaire ne peut donc, dans ce cas, qu'être assortie d'une lecture politique.

« Il s'agit de savoir si s'attaquer au pire ne conduit pas à se priver du meilleur »

Jacques Auzou est un homme politique de tout premier plan. Maire de Boulazac, une des communes les plus dynamiques du département – elle a plus que doublé sa population en 50 ans – passant de 2 839 à 6 603 habitant –, Vice-président du conseil général et président de la Communauté Isle-Manoire, Jacques Auzou, ancien percepteur n’est pas un novice. Communiste, donc allié quelque peu trouble-fête dans la nouvelle majorité parlementaire, puisque après avoir refusé de participer au gouvernement de Jean-Marc Ayrault les communistes durcissent le ton et se démarquent de la grande famille de la gauche.

Localement, Jacques Auzou n'a jamais caché ses ambitions de briguer la présidence de la future Communauté d'agglomération périgourdine qui naîtra après les élections municipales de 2014. Le socialiste, maire de Périgueux, Michel Moyrand non plus. Le charisme et les succès de Jacques Auzou posent un bémol à la toute puissance socialiste dans le département. Bernard Cazeau, président du conseil général et le député Germinal Peiro — tous deux socialistes — entretiendraient les meilleures relations avec Jacques Auzou. Relations imposées et de circonstances par définition. Avant même que l'affaire ne soit sur la place publique les inévitables bruissements des bistrots et marchés distillaient depuis le début des rumeurs se transformaient en information avec le temps. La dernière est celle du complot contre Jacques Auzou.

Il est vrai que, comme le soulignait récemment Nicolas Stoskopf professeur d'histoire contemporaine :

« Il s'agit de savoir si s'attaquer au pire ne conduit pas à se priver du meilleur. »

Dans cette affaire le propos a du sens. D'autant que, au terme des informations données par le procureur de la République de Périgueux et la presse locale on peut noter que nous sommes sur de prétendues fautes de forme plus que de fond. Mais, le droit français s'attache à la forme et minore le fond.

Michel Moyrand, le premier concerné par ce prétendu complot s'en défend

On prétend que l'affaire aurait été déclenchée à l'initiative du ministère public suite à des informations diffusées par la presse ainsi que le fameux rapport de la Cour régionale des comptes. Mais la rumeur publique qui reconnaît en Jacques Auzou un élu de haute qualité aux résultats indiscutés ne manque pas de s'interroger sur les avantages politiques que pourraient tirer les socialistes de ces démêlés qui peuvent aller jusqu'à l'inéligibilité de Jacques Auzou ce qui le mettrait hors jeu sur l'échiquier des prochaines municipales. Michel Moyrand, le premier concerné par ce prétendu complot s'en défend. Il n'empêche que la question perdure.

Outre l'éventuelle sanction judiciaire cette hypothèse ne manquera pas d'être éclairée. Si elle était avérée, les communistes locaux et le front de gauche ne manqueraient pas de faire payer la note en présentant une liste sur Périgueux mettant en plus grande difficulté le maire sortant et feraient le jeu d'une droite divisée mais qui pourrait se réconcilier et, comme au bon temps d'Yves Guéna trouver un appui occulte auprès des communistes pour éliminer les socialistes de la première ville de Dordogne mais aussi des leviers de la nouvelle intercommunalité. L'enjeu majeur étant la distribution des rôles dans la Communauté d'agglomération périgourdine.

On notera, à cet effet, le soutien de Philippe CornetUMP et candidat à l'élection municipale sur Périgueux en 2014 et opposant de Michel Moyrand – à Jacques Auzou ; le chef de file des communistes départementaux, Laurent Péréa montant naturellement au créneau ; les socialistes se murant dans le silence.

Quelques jours auparavant Jean-Paul Daudou, autre prétendant UMP à la mairie de Périgueux, répondant à la présidence de la prochaine Communauté d'agglomération périgourdine ne tarissait pas d'éloges sur Jacques Auzou : « Il ferait un bon président mais on n'en est pas encore là. »

Claude Bérit-Débat, actuel président socialiste de la Communauté d’Agglomération mais aussi sénateur qui a indiqué ne pas se représenter à cette charge a ferraillé avec Jacques Auzou dans la négociation âpre qui a accouché de la nouvelle intercommunalité. Son bilan et le personnage sont plutôt bien remarqués. Il faut attendre l’application de la loi sur le cumul des mandats pour l’écarter définitivement. Il fait parti des élus socialistes à ne pas s’être plié à la règle du parti qui date de 2010. Il reste le joker d’un jeu que le commun des mortels ne peut que supputer.

On ne peut oublier que l'élection de Michel Moyrand en 2008, qui était improbable et ne fît pas que des heureux chez ses amis. L'élimination de Jacques Auzou pourrait-elle entraîner celle de Michel Moyrand ? Coup double ? Simple hypothèse.

Ceci nous ramène à la plaidoirie de Cicéron devant les pontifes pour la défense de Sextius Rocius qui posa la question :

« Cui domo ? — À qui profite le crime ? »

Auteur : Pascal Serre

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Commentaire de Anonymous Anonyme , le 30 octobre 2012 à 15:06  

Pour moi qui ne suis qu'un citoyen de base et qui ne suis pas introduit dans les arcanes de la politique périgourdine, je ne peux qu'etre stupéfait devant les qualités prétées à M Auzou (élu de haute qualité aux résultats indiscutés - je cite)
- Mon constat est tout autre:
endettement (trop) important
- course aux zones industrielles et artisanales avec la voisine Trelissac
- rond poinite aigue (et à quel prix!)
Aujourd'hui, l'est de périgueux est un alignement de zones, d'hyper, de zones à nouveau. Visiblement l'humain n'est pas le souci premier.
Alors pour ma part, je préférais que M Auzou reste là ou il est, c'est à dire à Boulazac et qu'il évite de faire profiter la CAP de ses "indiscutables talents".

Commentaire de Anonymous Didier lajoinie , le 1 octobre 2014 à 22:11  

Bonjour,
Je viens de voir les informations nationales sur France2, avec un reportage sur les dépenses publics au sujet des aéroports de province, ils prennent comme exemple Perigueux bassillac, un gouffre abyssal !! 1 millions d euros par an !! Ils interview alors Auzou sur cette question.
Je cite " les contribuables payent énormément de choses,,Versailles,, "
En sachant que nous avons un aéroport à bergerac qui est déjà dans le rouge, et que bassillac ne sera pas un levier aux commerce sinon ça fait longtemps que ce serait fait ! Et ça, tout les contribuables le comprennent sauf auzou.. De toute façon ces petits politiques, grassement payés, qui courent après les mandats, creusent nos déficits en toute impunité, n ont pas les compétences nécessaires et pré olivine leur intérêt personnel au détriment de ce pourquoi il sont élus.


 

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