La carte postale du Cancan mardi 23 août 2011
Le cancan du Coderc est une chronique hebdomadaire dont le sujet est la place du Coderc à Périgueux et ses people, rédigée par le journaliste Pascal Serre :
Les copains rédigent leur carte postale de l’Atlantique aux Alpes. La mienne a pour cadre la place Saint-Silain. Ici point de Cyclopes ni de Pénélope ; et pourtant cette petite place aux abords harmonieux pourrait bien être mon Ittaque à moi.

Quel diable d’habitude que de vouloir comparer et de ne pas se satisfaire du théâtre d’ombres de ce rendez-vous feutré aux confidences murmurées ! L’âme d’Ulysse n’y trouve aucun soleil couchant et aucune colonie ne s’y est implantée. Je ne me suis point déguisé en mendiant pour gagner ce palais riant, le cœur aux lèvres et l’esprit en alerte.
Les sous-titres de ce cancan
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L’enseigne « Cordonnerie » s’efface doucement, ayant cédé pour une activité de bar | Claudette Lothaire apprécie la douceur de l’atmosphère et la diversité des choix tout autant que l’exposition qui facilite les rencontres | |
2011 © [1] & [2] Pascal Serre |
La fontaine qui trône ainsi en ce lieu doit son nom – Wallace – à un philanthrope anglais qui dota Paris au XIXe siècle de nombreuses fontaines. Le modèle initial est signé Charles Auguste Lebourg. Tout ceci n’a guère d’importance mais il est toujours bienséant de rafraîchir la mémoire des choses anciennes.
Honneur à la truffe d’été
La place Saint-Silain ? Moins de mille mètres carrés bordées d’une quinzaine de boutiques toutes aussi aguicheuses qu’affectueuses. Il y a parfois des accents pagnolesques entre cabaretiers. Mais c’est pour le folklore.Francis Delpey, avec sa boutique au mille saveurs bien nommée « Le sixième sens », multiplie les initiatives pour qu’ici aussi domine un esprit, un élan. Il a créé de toutes pièces et bien seul au départ un marché des truffes d’été. De dix à treize heures, chaque samedi, parfois accompagné de quelques musiques bien choisies, c’est le défilé du tout Périgueux.
Le plus fidèle est Philippe Cornet qui fut désespérément absent durant deux bonnes semaines. Vacances obligent et n'y voyons aucune allusion politique à ce constat. Quant à Gatienne Doat, maire-adjointe, elle ne s’y est pas trompée et a trouvé en François Martins, promoteur de la fête de la Truffe de Campagnac-les-Quercy un guide attentionné.

Il faut rappeler qu’à la fin du XIXème siècle la place Saint-Silain était dédiée à la tuber melanosporum ! Et ceci n’a pas échappé au maître queux Francis. La tornade passée, nous surprenons Francis et Jürgen Prast, qui a troqué son appareil photo contre des dés.
Maladroitement installé autour d’un tonneau, les deux compères entament une partie de jeu de carrés.
Attention c’est du sérieux ! Mais Francis à l’œil vivace et veille au bon ordre de sa terrasse.

De Rachilde à Goudeau
Laurent Mossion et Denis Chaput-Vigouroux surpris à l’ombre des tilleuls en grande discussion. Le premier est délégué de l’UMP pour la circonscription de Périgueux ; le second, membre de la docte Société historique et archéologique du Périgord, s’est épris du remuant Eugène Le Roy, romancier de son état et de Rachilde, écrivaine effrontée. L’éminent chercheur en a commis un essai au Mercure de France. Il y a là une intonation qui ne déplairait pas à Émile Goudeau, journaliste, romancier et poète.
Natif de Périgueux, il fonda et présida à Paris le Cercle des Hydropathes. Goudeau me rappelle quelque part William — oui, mon rédacteur en chef — ; il payait ses collaborateurs en boisson et, notamment en absinthe verte. Émile Goudeau fut un des piliers de cette période Montmartroise ne cédant en rien et dans La revanche des bêtes de clamer :

La saga Lothaire
Toute proche, distinguée dans l’allure, élégante dans le propos, avenante dans le regard, Madame Lothaire, digne représentante de l’une des plus anciennes familles de commerçants de Périgueux a choisi, comme souvent, le lieu pour y déjeuner bien accompagnée.La famille Lothaire ? Une saga débutée au fond du Toulon dans la fin des années quarante et dont on connaît aujourd’hui la réussite sur les boulevards. Jérôme, le petit-fils, ouvre ce 17 août une nouvelle boutique, à Bordeaux. Ce ne sera guère que la
Betty Wieder et son cortège d’amis bienveillants
Betty Wieder inlassable combattante de toutes les discriminations, présidente de la LICRA, s’installe quelque peu essoufflée. Elle se remet doucement d’une pénible opération chirurgicale et la place Saint-Silain lui apporte son cortège d’amis bienveillants. Betty et Marcel — son époux — multiplient les actions et, comme chaque année, elle me rappelle que le 18 juillet dernier, à l’occasion de la rafle du Vel d’Hiv elle s’est exprimée avec toute l’émotion et l’énergie qu’on lui reconnaît et qu’elle transmet.
Dans un repli, adossé à un mur, confortablement assis, Pierre Plantié médite sur l’année sabbatique qu’il prend afin de partager la vie d’un monastère. Il a longtemps travaillé au sein de la Chambre de commerce et d’industrie de Périgueux — puis de la Dordogne — à l’animation du commerce de notre bonne cité ; le voici aujourd’hui responsable du service développement entreprises et territoire. Ne m’en demandez pas plus.

Mon verre de bière est vide. Au passage, mais ce doit être un signe des temps, le prix de celui-ci est exorbitant. Je me garderai d’en dire le montant. Parce qu’au fond ce n’est pas le plus important et je cultive l’élégance des nobles désargentés.

Mais alors, le « Coderc » n’est pas un espace clos ?
Le froissement des feuilles annonce quelque orage. Bistrotiers et aubergistes tendent l’oreille et scrutent le ciel qui s’assombrit. Fort heureusement, l’infâme vent ira s'abattre ailleurs. Aurai-je la tentation ultime tel dans l’opéra Le retour d’Ulysse en sa patrie dû à Claudio Monteverdi ou encore Le Regard d’Ulysse du cinéaste Théo Angelopoulos de rentrer chez moi, en mon Coderc ?J’ai fait mon voyage et rédigé ma carte postale destinée aux amis, aux parents. Chemin faisant, muscadin de mon village, je me disais combien la chance m’assistait à prendre en compte ses vastes terres inconnues, si proches et si lointaines, celles qui apparaissent quand on croit avoir tout vu. Et puis, c’est en comédien qui joue le touriste que j’ai exploré et logé les confidences des uns et des autres, violé les transpirations de ces murs encore chauds et qui tiédissent avec le soleil pâlissant.
Durant quelques heures j’ai mouillé dans l’Ithaque moderne. Je prolonge mon errance estivale en commençant à dessiner des voyages affolants dans les rues, venelles, places et placettes de la ville. De celles-ci surgissent des impressions surprenantes dues à des aventures communes et différentes qui transportent mon Coderc aux quatre coins de la cité. Mais alors, le Coderc n’est pas un espace clos ? Ce serait un état d’esprit qui coule dans les veines de toute la ville ? Oh que voilà une bien belle carte postale pour mes bons copains. Bons souvenirs de la place Saint-Silain !
Auteur : Pascal SERRE
Pascal Serre, journaliste périgourdin, est membre de :
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Libellés : francis-delpey, Le-cancan-du-Coderc, LICRA-Perigueux, Nicolas Lux, Pascal-Serre, Philippe Cornet
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belle carte postale qui met aux oubliettes les caricatures. Un peu de poésie dans la vie ça fait du bien. On préfère Périgueux sous cet angle même si comme vous dites c'est mièvre. Tant mieux.
Bonjour,
Merci à Pascal pour le clin d'oeil à "Madame Lothaire" mais ce n'est que le septième - et non le dix-septième - magasin que nous avons ouvert.
Merci Jérôme, c'est rectifié.
Merci de me découvrir votre jolie région . Vos photos sont superbes et vos commentaires passionnants !!!