Nicolas Sarkozy en infraction  ? dimanche 2 décembre 2012

Une analyse sur la politique locale, rédigée par le journaliste Pascal Serre

Nicolas Sarkozy s'est invité dans la grande mêlée qui secoue l'UMP. Membre du conseil constitutionnel déroge-t-il à la règle de confidentialité ?

Passée inaperçue l'entrée dans la grande mêlée de la famille gaulliste de Nicolas Sarkozy, la question se pose de la règle de confidentialité imposée aux membres du Conseil constitutionnel au sein duquel l'ancien président de la République siège de droit.

Le Conseil constitutionnel créé en 1958 à l'initiative du général de Gaulle veille à la régularité des élections nationales et référendums et se prononce sur la conformité des lois et de certains règlements dont il est saisi.

À l'époque, Michel Debré disait  :

« Ce qu'il nous faut, c'est une arme contre la déviation du régime parlementaire. » Dès lors les neuf membres furent appelés les « sages ».

Nicolas Sarkozy, FranceNicolas Sarkozy © Droits réservés

Une règle mise en berne

L'article 7 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 précise les obligations de ses membres ainsi :

« Ces obligations doivent notamment comprendre l'interdiction pour les membres du Conseil constitutionnel, pendant la durée de leurs fonctions, de prendre aucune position publique sur les questions ayant fait ou susceptibles de faire l'objet de décisions de la part du Conseil, ou de consulter sur les mêmes questions. »

On notera qu'il n'est nullement posé la question de l'intervention dans la vie des partis politiques. Il y a là une sorte d'intervalle, de vide juridique qui pousse aux interprétations les plus ouvertes.

La coutume a voulu, avec le temps, que ses membres s'interdisent toute immixtion dans la vie politique nationale. En Dordogne il en fut ainsi avec Yves Guéna qui se refusait à toute déclaration relevant du fonctionnement et divers événements touchant son parti politique. L'esprit de l'institution née avec la Cinquième République était respecté.

Nicolas Sarkozy, sage turbulent

En mai dernier, à la suite de la nomination de l'ancien président de la République, selon Le Figaro, Nicolas Sarkozy considérait

«  que le fait de siéger parmi les Sages ne lui interdit pas de prendre parfois position dans la vie politique française » Il pensait sans doute à M. Giscard d'Estaing qui lui a apporté son soutien lors de la campagne électorale. On songeait aussi à Mme Simone Veil appelant à voter «  oui  » au referendum sur la Constitution européenne, en 2005, alors qu'elle était membre du Conseil.

Ces choix, on doit le reconnaître, vont à l'encontre des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance de 1958 qui interdit aux membres du Conseil de prendre une position publique

« sur des questions ayant fait ou susceptibles de faire l'objet de décisions du Conseil constitutionnel ». Mais comment serait-il possible de savoir que tel ou tel sujet, évoqué par exemple dans un débat télévisé, ne donnera pas lieu ensuite à une question prioritaire de constitutionnalité ? L'élargissement constant du contentieux constitutionnel rend très contraignante cette obligation de réserve, même si Nicolas Sarkozy n'est pas le premier à envisager sa violation.

Le bénéfice du doute

Alors Nicolas Sarkozy est-il en rupture avec la sagesse attendue et retenue par ce principe de confidentialité  ? Il ne serait pas incongru de penser que la geste gaullienne n'est pas respectée.

Nicolas Sarkozy a bel et bien mis à l'encan de façon audacieuse le principe de précaution visant à préserver son impartialité que lui impose sa charge de «  sage ». Posture caractéristique de sa personnalité parfois démesurée.

Face à l'interrogation juridique, Nicolas Sarkozy bénéficie du doute dans cette chronique d'une infraction non caractérisée.

À dire vrai, il n'est pas anormal qu'un ancien président de la République désire intervenir dans le débat politique. Ce qui est anormal, c'est qu'il siège au Conseil constitutionnel.

Auteur : Pascal Serre

Trouvez ci-dessous d'autres analyses politiques de Pascal Serre :

Patrick Ollier ou la fable du joker menteur → (lundi 26 novembre 2012)

Jacques Auzou : à qui profite le crime ? → (lundi 29 octobre 2012)

Jean-Paul DAUDOU : l'appel du 26 septembre → (mercredi 27 septembre 2012)

Philippe Cornet : le déjeuner de trop ? → (mercredi 13 juin 2012)

Michel Moyrand : l'année des méduses → (samedi 4 août 2012)

Colette Langlade ou la politique au féminin(mercredi 18 juillet 2012)

La rose pourpre de Bernard Cazeau → (mardi 19 juin 2012)

Le joker Mortemousque → (lundi 25 juin 2012)

Cliquez pour toutes les analyses politiques de Pascal Serre →


Libellés : ,

Pour commenter les billets, veuillez cliquer sur le bouton rouge ci-dessous à droite ↓
Les commentaires, analyses et autres opinions qui paraissent dans Périblog, n'engagent que leur auteur.







Commentaire de Anonymous Anonyme , le 4 décembre 2012 à 08:07  

Pourquoi les autres médias n'évoquent pas ce sujet et que c'est votre site qui en parle ? Cette analyse semble si évidente qu'elle m'avait échappé. Qu'on la lise elle ne manque pas d'intérêt.

 

Découvrez (ou redécouvrez) Périgueux capitale administrative de la Dordogne à travers les archives de Périblog