Si Paulette m’était contée… jeudi 16 juin 2011

Le cancan du Coderc est une chronique hebdomadaire dont le sujet est la place du Coderc à Périgueux et ses people, rédigée par le journaliste Pascal Serre :

Les retraités lisent beaucoup la presse. Elle devient un sujet de conversations. Un vrai spectacle aussi. Quelques échos volés dans le caquetage hebdomadaire car, ici, les journalistes ont un visage et la carte de presse n’est pas un signe extérieur de sérieux.

Ils sont là. Tous les cinq. Pas une défection. Mais que se passe-t-il pour une telle mobilisation ? Pénétrant dans le cénacle marchand du Coderc je découvre mes compères attablés, le long du bar de La Truffe, presque coincés par les nombreux consommateurs installés chez Pascal Mesmain. Les tasses de cafés sont déjà vides. Il me faut batailler pour trouver une chaise et me glisser maladroitement au cœur du réacteur à commentaires.

Les débats semblent déjà lancés. Les journaux sont dépliés causant quelques tracas aux passants qui n’ont de cesse de s’excuser. Je commande le café qui ne remplacera jamais les divines huîtres et le muscadet. Les salutations sont fugitives mais franches. J’écoute tout en sollicitant une nouvelle tournée de café votée à l’unanimité.
Gérard Fayolle et Paulette Labatut

Paulette LABATUT : « Les Périgourdins ? Quand on leur est utile, ils nous cajolent ». Gérard Fayolle à sa droite : ancien Président du Conseil général de la Dordogne (1992-1994), ancien Sénateur (1997-1998), Président de la Société Historique et Archéologique du Périgord 26/05/2011 © Pascal Serre

Qui a connu Paulette à la mairie ?

Paulette. Faut-il ajouter le nom de famille ? Pour les familiers du Coderc ce n’est pas utile. Un peu comme Jeannette. Christian en exquis investigateur et gardien de la mémoire la plus reculée a déplié son édition du journal Sud-Ouest1 où on rend un hommage trop mesuré à son goût à l’ancienne première adjointe de Yves Guéna.
- Ah qui a connu Paulette à la mairie ?!

- Moi, quand je travaillais à la mairie. C’était un sacré bout de femme. Je n’étais pas de son bord, elle le savait, mais elle a toujours mis ses idées politiques dans sa poche quand elle discutait avec moi. Guéna avait là son meilleur agent électoral.


Bernard, l’ancien éboueur – on ne disait pas encore ripeur - poursuit :
- À mon époque, sa porte était toujours ouverte, pas besoin de prendre rendez-vous. Si elle n’était pas là on pouvait l’appeler chez elle et tout se réglait sans problème. Oh on ne se laissait pas faire mais elle avait les mots pour.

Alain qui tenait commerce rue Taillefer rajoute :
- Je la voyais, comme d’ailleurs la grande majorité des élus de l’époque déambuler, saluant les uns, serrant les mains des autres. Nous nous connaissions et elle avait toujours un mot plaisant. On parlait pas de politique mais de la pluie, du beau temps. J’en profitais pour lui glisser quelques appréciations personnelles sur la vie périgourdine. Rien ne restait sans réponse. Une petite carte, une lettre du maire arrivait quelques jours après… Ah oui que Guéna pouvait s’appuyer sur elle !

René, fervent communiste d’un temps révolu où les joutes électorales qui n’avaient rien de tendres lève le doigt et assène :
- Voyez-vous, c’est une grande dame ! Pas à la Ségolène à la mode Aubry… Pas de grandes tirades qui nous trimbalent je ne sais où, mais toujours disponible pour aider, conseiller, trouver la solution qui rassurait. Je sais qu’au Parti, dans les réunions d’antan nous étions complaisants à son égard, presque admiratifs. La cage d’escalier, elle connaissait.

Paulette – c’est l’appellation familière mais respectueuse des anciens - savait que le Coderc était un véritable institut de sondage. Elle y affrontait avec superbe les récriminations les plus folles sans laisser poindre le moindre agacement. Elle donnait à chacune et chacun l’impression d'être importants et que leur histoire avait désormais un sens. Tout un art consommé entre deux étals, deux rayons de soleil.

Avec les années et son retrait nuancé de la vie politique, Paulette Labatut espace ses venues sur le Coderc. Elle manque. Aux plus anciens car, les plus jeunes n’ont pas connu ce temps où on savait se parler sans se heurter. Le marché était un lieu sacré, une sorte de réceptacle d’une citoyenneté empreinte de bonhomie, d’humanisme dirions-nous aujourd’hui.

Ciao Pantin

Jean-Paul, habitué du quartier Saint-Martin rend un hommage tout aussi appuyé à son pompiste, Michel Brousse dont le journal Sud-Ouest2 a parlé cette semaine. Il nous rappelle qu’il y a une vingtaine d’années le centre ville offrait pas loin d’une dizaine de stations-services qui contribuaient à la vie des quartiers.
- Je paye mon essence un peu plus chère mais je sais que je peux compter sur ses avis et conseils. J’ai toujours connu une station à cet emplacement. Elle disparaîtra comme les autres…

Alain dont les connaissances cinématographiques nous surprennent toujours poursuit :
- Ce que tu me dis me rappelle le film « Ciao Pantin » avec Coluche… Une station d’essence c’était presque un service public. Il y avait une vie avec ses visages, ses histoires et on y retrouvait souvent des connaissances. Pendant que le pompiste remplissait le réservoir on bavardait.

La petite équipe toute ramassée autour de la petite table, bousculée par les passants, se presse sur sa tasse de café qui refroidit. Silence enveloppé d’un tohu-bohu qui indique que l’heure est avancée et que le marché est à son comble.
Michel Brousse pompiste à Périgueux Les vespasiennes de Périgueux 24
Michel Brousse, le pompiste de la rue Louis-Blanc
Les vespasiennes ou pissotières du « Coderc » un passage obligé plus que désiré
06/2011 © Journal Sud-Ouest [1] & [2] A. B.
Les travaux des latrines de la place du Coderc par Manu Allicot Les vespasiennes de Périgueux 24 prisent en photo par Manu Allicot
Manu Allicot, photographe et guitariste émérite qui traversait la place cette semaine a bien voulu prendre pour Périblog ces quelques clichés des travaux en cours
Photo par Manu Allicot, Périgueux
16/06/2011 © Manu Allicot, photographe (voir son site web www.dementiaphotos.com)

Les vespasiennes rénovées

Les vespasiennes qui jouxtent la halle vont être rénovées. Alain nous rapporte l’article d’un autre Alain (Bernard), journaliste à Sud-Ouest3. Ce n’est pas du luxe. Les jours de marché elles sont très utilisées tant par les producteurs que les visiteurs. Yves Beaugier qui passe et nous salue surprend notre échange et lance :
- Il y a longtemps que l’on aurait du faire ça. Mieux vaut tard que jamais !

Christian toujours à la pointe de l’information nous indique que tout sera refait, une cabine sera créée avec pas moins de neuf urinoirs assortis d’un point d’eau. Il y aura même un accès pour les handicapés.
- Et bien, vous voyez Moyrand il fait bien quelque chose !

La sommation de Bernard entraine une hilarité générale et la réplique de Alain :
- Mais oui, bien sûr, il est bien « ton » Moyrand.

Et notre ancien détaillant en lingerie de déclarer qu’il n’utilise jamais ce lieu commun. Toute la tablée accompagne d’un assentiment général son propos. Le temps est incertain comme depuis quelques jours. Jean-Paul se hasarde à évoquer le « festival Art et Eau » sans succès. Bernard en profite toutefois pour déplorer le vandalisme4 dont a fait l’objet une des œuvres.

- Franchement, c’est nul… Une affaire de potaches qui n’honore pas ces derniers.
Denis Soulié
Denis Soulié, le « beauf » de Biraud 26/05/2011 © Pascal Serre

Le « Beauf » à Biraud

France Galle et Maurice Biraud dans les années 60Passe Denis Soulié, ancien directeur du cabinet de Bernard Cazeau, qui fut un temps « Monsieur Autoroute », et un des créateurs du Conseil en architecture et environnement de la Dordogne. De son Plantier tout proche c’est un discret habitué du Coderc dont Christian qui l’a bien connu nous révèle qu’il est le beau-frère de l’acteur disparu en 1982, Maurice Biraud5. Et notre ancien de poursuivre :

- Je me rappelle de Maurice Biraud car il fut un des humoristes les plus célèbres des années 60 ; il était le commissaire Socrate dans « Signé Furax » ; et je n’oublie pas ses rôles dans un « Taxi pour Tobrouk » ou « Le cave se rebiffe ». Il vivait, si ma mémoire est bonne, à Collonges-la-Rouge en Corrèze.

La médaille de la « Ville de Périgueux » pour Jean-Pierre Monmarson

Roulement de tambour à l’autre bout de la place, direction la rue des Chaînes. Ce doit être notre bon garde champêtre qui nous annonce quelque nouvelle. Nous nous dressons d’un commun accord. La note réglée, notre vieille garde se dirige vers l’ordonnateur de ce tapage bien connu.
- Tu les utilises les vespasiennes ? lance René à son adresse.

Et Jean-Pierre Monmarson de répondre :
- Le moins souvent possible car elles sont sales.

Notre ami se désole de ne pas être associé au « festival Art et Eau ». On souscrit à son tourment par quelques bourrades dans le dos. Ce personnage étonnant et déterminé entraine notre admiration et notre sollicitude. Nous nous séparons en souhaitant qu’un jour, le maire lui attribue la médaille de la « Ville de Périgueux ». Ce serait la moindre des choses, faute de lui apporter quelques monnaies sonnantes et trébuchantes bien utiles pour la vie courante… Le maire de la commune libre du Coderc pourrait en faire la demande. À vous, Jean-Jacques !
Auteur : Pascal SERRE
(1) Journal Sud-Ouest du jeudi 9 juin 2011
(2) Journal Sud-Ouest du mardi 7 juin 2011
(3) Voir Sud-Ouest du lundi 6 juin 2011
(4) Voir Sud-Ouest du mardi 7 juin 2011
(5) Maurice Biraud (1925-1982). Acteur de cinéma mais aussi humoriste.


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Pascal Serre, journaliste périgourdin, est membre de :
  • Institut Montaigne (Paris)
  • Fondation Terra Nova (Paris)
  • Fondation de la France Libre (Paris)

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Commentaire de Anonymous Anonyme , le 19 juin 2011 à 18:00  

Des toilettes pour les vieux incontinents de notre ville tranquille.
Quelle bonne idée.
Quand la mairie changera de place il restera le local a vendre pour y faire un hospice.
Perigueux ville ridée

Commentaire de Blogger Périblog - William Lesourd , le 19 juin 2011 à 20:01  

Les incontinents (urinaires) n'utiliseraient-ils pas plutôt des slips absorbants que des vespasiennes ? Pas que je sache moi-même, ma vessie étant sans reproche.

Commentaire de Anonymous Anonyme , le 20 juin 2011 à 11:03  

ces toilettes ne visent qu'a rassurer ceux qui en effet ne peuvent pas se retenir.
S'ils ne les utilisent pas pour uriner que cela servent au moins a faire des rencontres.

Commentaire de Anonymous MONMARSON Jean-Pierre , le 9 juillet 2011 à 00:12  

Je ne demande pas que l'on m'attribue la médaille de PERIGUEUX car cela c'a se mérite plus que de n'être qu'un pauvre bougre de "Garde Champêtre d'antan" cherchant a convaincre le public et les touristes. Notre belle ville doit être avant tout un accueil festif et sympa comme je m'efforce toujours à le faire et c'est pas avec des attributs de n'importe quelque sortes que ce soit, mais c'est avec de la gentillesse et un peu d'humour, c'est avec cela que je gagne du terrain peu à peu et de la reconnaissance par mes amis qui m'ont toujours fait confiance et ils sont très nombreux en Périgord comme de partout en France et à l'étranger lors de leur passage dans notre ville, et ceci sans prétention à en juger les milliers de photos sur lesquelles j'ai était photographié. J-Pierre MONMARSON

 

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